L’évangile d’aujourd’hui est bien connu pour sa finale : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». Nous appartenons à deux mondes : le temporel et le spirituel ; à nous de nous en accommoder sans les opposer. Cette première lecture faite, essayons d’aller plus loin en décortiquant le texte.
D’abord les pharisiens veulent piéger Jésus, l’emprisonner dans ses propres paroles. Notez que ce ne sont pas eux qui viennent interroger Jésus mais leurs disciples et des partisans d’Hérode, des représentants des deux mondes. Notez aussi que Jésus est reconnu comme un maître qui enseigne la voie de Dieu, ce qui veut dire qu’ils reconnaissent que son enseignement est conforme à la Loi de Moïse et peut mener vers Dieu. Ils vont même plus loin puisqu’ils reconnaissent que Jésus est impartial et ne se laisse influencer par personne.
Le piège qu’ils ont préparé porte sur l’argent, le temporel avec un prolongement religieux puisque dans l’empire romain César est honoré comme une divinité. Jésus en demandant l’effigie, la tête gravée sur les pièces d’un denier, les piège à son tour : non seulement ils en ont dans leurs poches, mais ils s’en servent, donc reconnaissent César comme divin. Bref, la réponse de Jésus règle-telle la question ? Peut-être pas complètement et surtout peut-elle nous intéresser à nous aujourd’hui dans un tout autre contexte.
Rendre à César, payer l’impôt, rien de plus normal, d’autant plus que c’est obligatoire. Pour Dieu, rien n’est dû, à nous de lui donner ce que nous voulons. César avec sa tête sur les deniers réclame la part de l’état pour qu’il puisse tourner ; Dieu lui n’a pas d’effigie d’autant plus qu’il est interdit pas la Loi de le représenter. Et pourtant Dieu a une image dans le monde et elle est sacrée : l’homme ! Rappelez-vous : « Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, homme et femme, il les créa » (Genèse 1, 27). En fait ce que nous voulons donner à Dieu, nous le donnons à l’homme. « Ce que vous ferez à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous le ferez » (Mt 25, 40).
Rendre à César, donner à Dieu, à l’humanité, c’est pour nous se situer sur ces deux registres de notre vie quotidienne : la vie collective qui nécessite nos impôts de toutes sortes et tout ce qui est de l’ordre du don gratuit, de la solidarité et de la fraternité. Comme nous marchons sur deux pieds, notre vie ne peut être équilibrée sans ‘appuyer, sans vivre ces deux dimensions. Aujourd’hui, où notre société est traversée par de nombreuses crises, les petits, ceux qui sont fragiles, ceux qui souffrent doivent être notre priorité. Bien des associations œuvrent pour eux et nous sommes souvent sollicités pour les soutenir. Vivons avec elles cette fraternité de proximité. Aujourd’hui les conflits mondiaux sont nombreux et cruciaux pour des populations entières, sans parler de celles qui subissent de plein fouet les conséquences de la crise climatique. Matthieu nous appelle à nous intéresser à elles, à tout faire pour qu’elles aient droit à une vie juste et heureuse. Souvent nous déplorons notre impuissance, mais là encore nous ne sommes pas seuls et des associations sont sur le terrain avec des actions efficaces. Nous en connaissons tous : CCFD, Action contre la Faim, Secours Catholique, Villages d’enfants, etc. Il ne s’agit pas de donner pour ne plus voir le problème, mais de donner parce que l’homme est à l’image de Dieu, qu’il est un frère et que nous sommes tous solidaires dans notre monde. Donnons à Dieu en fraternisant !
Père Jean COURTES