Cette page d’évangile de l’appel des disciples peut faire penser au départ des pèlerins qui prennent la route de saint Jacques de Compostelle. Ils partent pour 1 000 ou 1 500 km avec un minimum de bagages et en faisant confiance : ils trouveront tous les jours ce dont ils ont besoin tant physiquement, que psychologiquement et spirituellement. A la grâce de Dieu ! Cette légèreté du pèlerin va d’ailleurs s’accentuer tout au long du chemin : faire la vérité, la lumière pour retrouver l’essentiel, demande l’abandon de bien d’habitudes, certitudes et idées. Un mois ou plus après le départ, il n’est plus tout à fait le même.
Jésus ne peut accomplir seul la mission que le Père lui a confiée. Il appelle des disciples pour annoncer que Dieu a fait alliance, que Jésus est son Fils et que nous sommes tous enfants de Dieu. Les obstacles sont connus : refus d’être entendus – on ne change pas de religion comme on change de chemise ! – suspicion vis-à-vis d’un nouveau discours, manque de références : au nom de qui parlent-ils ? etc. Alors Jésus les envoie avec pour seul bagage : « Dieu seul vous suffit ». Il sera avec eux tous les jours et pourvoira à leurs besoins, seule leur foi en lui sera leur force et le gage de la réussite. Et ils partirent !
Aujourd’hui, nous, chrétiens baptisés, nous sommes choisis pour annoncer cette Bonne Nouvelle. Comme au début, la tâche est difficile et nous cherchons toujours le meilleur équipement, la meilleure manière de faire, le meilleur argument pour convaincre, la meilleure attitude pour amener l’autre à se poser la question de Dieu. Jésus nous dit à tous : « Faites confiance, vous avez reçu l’Esprit saint pour cela, partez, mais pas seul, car le double témoignage est essentiel ». Ces compagnons missionnaires seront aussi un soutien, aideront au discernement et à une parole ajustée. La fraternité parle d’elle-même, elle est porteuse d’alliance et d’amour.
Aujourd’hui nous avons fait l’expérience que la meilleure méthode catéchétique à elle seule ne convertit pas. Nous savons bien que tel style de prière ne convient pas à tout le monde. Nous voyons bien nos limites pour tenter d’annoncer notre foi au Christ ressuscité. Allons-y tels que nous sommes, avec nos atouts et nos manques, Dieu fera le reste ou plutôt à travers nous il fera tout. Mais nous avons besoin de repères : que dire, que faire aujourd’hui pour accrocher l’attention, l’intérêt et ouvrir un dialogue. Comme nous l’évangile, Dieu nous donne des moyens : la page des Béatitudes en est un. Parmi elles, peut-être que nous pouvons privilégier d’être artisans de paix. Dans notre monde fracturé soyons des facilitateurs de liens, de compréhension, de reconnaissance. Dans nos familles, sur notre lieu de travail, dans nos quartiers et notre pays, l’attente est réelle et pressante. Essayons de ramener le calme, les conditions d’un dialogue et d’une reconnaissance mutuelle. Nous pouvons faire des petits miracles : que l’autre se sente considéré, écouté et pourquoi pas aimé ; qu’il se sente exister à notre contact, qu’il a droit à notre considération et estime ; allons plus loin, qu’il se sente un frère, une sœur, un ami.
Un autre petit miracle est celui du pardon, d’une parole qui libère, du geste qui relie et rétablit la relation.
Vous croyez peut-être que vous n’annoncez pas directement la Parole de Dieu, détrompez-vous, vous êtes au cœur de la mission car l’évangile, la Bonne Nouvelle est celle de l’amour fraternel, du pardon et de l’alliance. Partons tels que nous sommes, légers, Dieu seul nous suffit. Il est là avec nous, en nous et les autres.
Père Jean COURTES