
La scène de la mise en croix de Jésus est saisissante chez l’évangéliste Luc : trois croix, deux malfaiteurs, un innocent, les soldats, la foule voyeuriste. La mort est omniprésente, non seulement pour ceux qui vont dans quelques heures rendre leur dernier souffle, mais aussi pour les autres, ceux qui regardent Jésus, narquois, lui rappelant que seul Dieu sauve. Oui, seul Dieu sauve et s’il était le Fils de Dieu, s’il était le Messie, titres qu’il ne s’est jamais donné, il ne serait pas là sur un gibet. Dieu ne sauve pas l’humanité par sa puissance mais par son amour incarné dans la fragilité, dans la faiblesse et les souffrances. En Jésus, il est le très proche de chacun d’entre nous.
Les deux bandits, Joatthas et Maggatras, selon un manuscrit latin, représentent les incroyants et les croyants devant le mystère de Jésus. Es-tu le Fils de Dieu ? Es-tu le Messie annoncé et attendu ? Es-tu celui qui vient pour bouleverser le monde et tous ses habitants ? Là sur la croix, au moment de la mort la question est radicale : peux-tu sauver l’homme de la mort ? L’un n’y croit pas mais l’autre a une lueur d’espoir. Et si c’était vrai ? Et si cet homme qui est innocent, condamné injustement pour ses idées, ses convictions et sa foi était celui qui vient inaugurer un autre royaume ? Aux portes de la mort, il croit que Dieu peut faire quelque chose pour lui et pour les autres.
Cette lueur d’espérance nous interroge tous : l’avons-nous ? Quand nous sommes dans la tempête, quand la mort nous touche de près, l’avons-nous ? Quand nous entendons parler de résurrection, y croyons-nous ? Nous sommes là au cœur de la foi chrétienne. Paul a des paroles fortes et claires sur le sujet : si nous ne croyons pas à la résurrection du Christ, notre foi est vaine. Alors où trouver cette lueur d’espérance ? Où trouver comme le « bon larron » cette force et cette clairvoyance que le Christ peut nous entrainer au « paradis », c’est-à-dire dans la vie de Dieu ?
Seule la foi engendre l’espérance. C’est parce que nous croyons en quelqu’un que nous espérons en lui, c’est parce que nous croyons en une cause que nous espérons qu’elle va aboutir. La foi ouvre l’avenir. Croire en Jésus, c’est donner du crédit à ses paroles et à sa vie. Elles traduisent l’amour et la miséricorde de Dieu pour tous les hommes. Les évangiles fourmillent d’exemples : dialogue avec Zachée, avec la femme adultère, avec les lépreux, les paralysés, les pharisiens et docteurs de la Loi. Tous sont touchés et remués par sa parole qui vient d’ailleurs et qui donne vie. Tous sont questionnés sur cette espérance en Dieu qu’il prêche. Tous comprennent au pied de la croix qu’il ne s’agit pas d’éviter la mort mais bien de la vie après.
Notre foi en la résurrection de Jésus se comprend par l’amour de Dieu Père pour lui. Seul l’amour est capable de traverser la mort et de proposer une nouvelle vie. Seul l’amour de Dieu pour nous tous peut assurer notre espérance. Oui, la mort est un passage, mais au cœur de lui, une lueur d’espérance brille : « Aujourd’hui tu seras avec moi dans la paradis ».
Père Jean COURTES