Rupnik
Le passage de l’évangile de ce dimanche peut paraître à certains d’entre nous insupportable et même intolérable pour ses exigences. Comment Jésus peut-il nous demander de l’aimer plus que nos parents ou de le préférer à leurs enfants pour ceux qui en ont ? Comment peut-il nous demander de renoncer à notre propre vie pour le suivre ? Oui, ces paroles sont difficiles, mais elles insistent sur deux attitudes propres aux disciples qui veulent annoncer l’évangile : aimer et recevoir.
Aimer à la manière de Jésus, c’est donner sa vie comme Dieu le fait en lui. Aimer à la manière de Jésus, c’est faire le choix de le mettre à la première place. Aimer à la manière de Jésus, c’est renoncer à certains projets personnels. La route que Jésus nous ouvre dans l’évangile est celle du don. Aimer est la réalité la plus forte, la plus fantastique qui nous arrive. Quand nous aimons, nous donnons tout et nous le savons par expérience, la question des différences est dépassée (les parents n’aiment-ils pas leurs enfants du même amour ?). Aimer, c’est tout donner comme dit la chanson. Aimer c’est se réaliser pleinement en sortant de soi, en se perdant en quelque sorte au profit de l’autre. Pour Jésus, le disciple aime, se donne, accueille les autres, c’est sa mission, c’est comme cela qu’il annonce l’amour de Dieu pour le monde.
Recevoir à la manière de Jésus, c’est accueillir. Accueillir l’autre, l’intime, le compagnon de route, le proche, le prochain, mais aussi celui qui est loin, qui ne nous ressemble pas, avec lequel nous avons des difficultés, etc. Bref, accueillir celui qui se présente tel qu’il est et nous connaissons les difficultés et les efforts qui nous sont demandés parfois. Mais accueillir pour le chrétien, c’est aussi recevoir le Christ, Dieu dans sa vie, le laisser prendre de la place, le laisser transformer notre vie. L’autre quand je l’aime, me change en profondeur. C’est ce qui fait écrire Paul aux Galates : « ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi ». Dit autrement, le Christ a pris tellement d’importance dans sa vie, qu’ensemble, ils ne sont plus qu’un.
La réussite de notre vie n’est-elle pas dans ces deux verbes : aimer et recevoir ? Pour ma part, en ce jour où je fête mes 50 ans de sacerdoce, je le crois et je le vis. Mon bonheur aujourd’hui est d’essayer d’aimer depuis 50 ans et plus, mes proches, mes prochains et tous ceux que la vie m’a permis de rencontrer. Ai-je eu des renoncements à faire ? Bien sûr que oui, comme chacun d’entre nous, mais en fin de compte, ils m’ont permis d’aller un peu plus loin sur ce chemin merveilleux du don et de l’accueil.
Juste un mot pour conclure : merci à vous, car grâce à vous et à Dieu, je suis un prêtre heureux. J’en rend grâce avec vous !
Père Jean COURTES