Parmi ses disciples, Jésus appelle les 12 pour une mission particulière : proclamer que le royaume des cieux est tout proche, avec le pouvoir d’expulser les esprits mauvais, guérir toute maladie et toute infirmité. Le programme peut nous paraitre étrange aujourd’hui, mais peut-être faut-il l’adapter à notre époque. Après 20 siècles d’expérience, l’Eglise continue d’appeler au nom du Christ, des hommes et des femmes pour qu’ils se consacrent exclusivement à la mission de l’annonce de la Parole de Dieu. Religieuses et religieux en congrégations spécifiques, vierges consacrées, prêtres diocésains, etc., leur variété répond aux besoins du monde. En Europe, en France en particulier, les vocations sacerdotales se font rares et les paroles de Jésus résonnent particulièrement : « la moisson est abondante et les ouvriers peu nombreux ; priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers ». Nombreux sont les ouvrages, études, réflexions, articles sur les causes de cette diminution et ce n’est pas ici le lieu de les analyser. Je veux simplement vous partager trois convictions qui m’habitent aujourd’hui en cette 53° année de mon sacerdoce.
D’abord, j’ai une vie formidable, hors du commun, grâce à l’appel de Dieu à devenir prêtre. Jamais je n’aurai imaginé avoir autant de contacts avec des personnes aussi différentes. Je n’avais pas imaginé non plus la confiance qu’elles m’ont faite. Oui, je remercie Dieu pour ces 53 années qui m’ont façonné et qui font qu’aujourd’hui, je peux vous dire en toute sincérité : je suis heureux ! Je reconnais aussi que mes supérieurs m’ont toujours proposé des missions où je me suis épanoui humainement et spirituellement. Je les en remercie.
En second lieu, vous le savez, la vie des prêtres, religieux et religieuses est une vie à part. Nous nous sommes engagés au célibat, nous n’avons pas d’enfant et de vie de famille, nous sommes aussi hors circuit économique ordinaire, puisque nous ne travaillions pas pour gagner un salaire et que nous sommes pris en charge par nos communautés. Personnellement, je me suis engagé à la prêtrise avec joie et enthousiasme et je ne le regrette pas loin de là. Mais je reconnais aussi que j’ai eu une chance formidable de trouver des équipes de prêtres fraternelles, ce qui a été essentiel pour moi. D’autre part, dans les lieux où j’ai été envoyé, j’ai trouvé des chrétiens engagés et responsables qui vivaient à fond la coresponsabilité. Grâce à eux, j’ai pris conscience que nous étions tous appelés à la mission de manière différente. Je reconnais aussi l’importance pour moi d’un réseau d’amis proches qui m’accompagne et me soutient. Le prêtre ne peut pas vivre seul !
Enfin, je crois très fort que notre organisation Eglise est appelée à évoluer. Que sera le prêtre en France dans 50 ans ? Probablement différent d’aujourd’hui. L’essentiel est l’annonce de la Parole de Dieu et le partage de l’Eucharistie. L’Eglise inventera demain des nouveaux ministères pour cela, c’est évident, car c’est sa mission. Soyons confiants ! Le pape François a lancé le synode sur la gouvernance dans l’Eglise car il sait bien que le statut quo est impossible à long terme. Toute réforme se fait dans la douleur, c’est donc normal qu’aujourd’hui nous vivions des tiraillements à ce sujet. Les nouvelles générations ne seront pas cathos comme nous, elles annonceront la résurrection du Christ autrement. L’essentiel est qu’elles inventent leur manière propre et non qu’elles reproduisent des vieux schémas qui sont usés. Le prêtre sera toujours au service de cette Parole vivante qu’est le Christ, qui éclaire la vie des hommes.
Tous appelés à la mission, tous appelés à répondre présents en fonction de nos charismes et circonstances de notre vie pour manifester toujours et encore que le Christ est ressuscité et qu’il nous ouvre la vie de Dieu.
Père Jean COURTES