
Tout le chapitre 17 de saint Jean nous rapporte une longue prière de Jésus à son Père. Il sait que son « heure est arrivée », que les évènements vont se précipiter, alors il se tourne vers Dieu pour lui faire une ultime demande : l’unité de ceux qui croient en lui et qui croiront plus tard. Pour que la Bonne Nouvelle qu’il a annoncée continue, il ne laisse pas de consignes particulières, pas de condensé de son enseignement, pas de catéchisme. Il leur fait confiance en leur demandant instamment de vivre l’unité et en priant le Père de lui accorder. Cette unité il l’a faite avec les 12, très divers, parfois opposés, il l’a prêchée aux disciples qui se sont attachés à ses paroles et qui se sont trouvés en bute avec les responsables religieux, il l’a demandée dans la prière à son Père. Pour lui, elle est le signe de l’amour de Dieu. A cette unité le monde reconnaitra sa présence, elle sera le témoignage irréfutable et indispensable de l’existence de Dieu.
Jésus insiste sur cette unité comme il l’a fait déjà plusieurs fois. « Il y aura un seul troupeau, un seul pasteur ». Cette unité se réalisera par la foi en lui. Il sera leur lien fort, leur trait d’union entre eux et avec Dieu. Cette unité sera à l’image de celle qu’il vit avec le Père. Un amour si grand, si fort les unit que rien ni personne ne pourra jamais les séparer. Cette unité le fait vivre, le porte, le guide jusqu’à la croix et le matin de Pâques. « Le Père et moi nous sommes un » « Nul ne connait le Père si non le Fils et celui à qui il le révèle », etc. L’alliance et l’amour sont au cœur de la vie de Dieu, manifestée en Jésus et celui-ci demande à son Père de lui accorder la grâce que cette unité subsiste à son départ et continue à se vivre entre ceux qui croient en lui.
Malheureusement l’unité des chrétiens a pris de nombreux coups dans l’histoire et même encore aujourd’hui. Ce signe de l’unité est devenu bien timide, tant il est difficile de dépasser les clivages culturels, historiques, émotionnels, etc. Certes, les derniers papes ont fait des efforts et ont manifesté leur volonté de vivre cette unité, mais sur le terrain, à la base, peu d’unité même s’il n’y a plus d’animosité. L’œcuménisme n’est plus une priorité. Pourtant nous croyons au même Dieu, au même Christ et nous faisons partie de la même Église voulue et instituée par Jésus. Pourquoi n’arrivons-nous pas à dépasser les divisions du passé ? Pourquoi les catholiques, les protestants et les orthodoxes ne participent-ils pas à la même eucharistie le dimanche ? Oui, nous connaissons tous les raisons théologiques, ecclésiales, historiques, mais est-ce suffisant pour rester diviser ? Le pardon n’est-il pas au cœur de l’évangile ?
En ce temps, ou du moins en Europe, le christianisme est en perte de crédibilité, l’unité voulue par le Christ serait un témoignage fort. Il dirait autrement la Bonne Nouvelle en présentant l’amour fraternel entre disciples. Pourquoi restons-nous aussi timides ? Pourquoi sur le terrain ne prenons-nous pas des initiatives qui peuvent devenir réalités ? Peut-être devons-nous revenir à cette prière de Jésus pour l’unité ? Il ne demande pas l’uniformité mais la communion. Comme dans tout couple, elle suppose l’accueil de la différence, le respect de chacun et la volonté de dépasser les conflits et les blessures par le pardon. Jésus nous fait connaitre sa communion à son Père et nous invite à y entrer pour devenir à notre tour un signe visible de son amour.
Il y a urgence. Il appartient à l’Église du 21° siècle d’être crédible dans son témoignage de foi en dépassant les frontières pour vivre l’inter-communion seule capable d’interroger les hommes d’aujourd’hui. Que le Père nous aide à ouvrir nos communautés pour ne former que celle voulue dès le début : une Église universelle ouverte à tous.
Père Jean COURTES