Après son baptême, Jésus est allé au désert pour réfléchir et pour prier avant de commencer sa prédication. Par trois fois, le diable lui propose d’échapper aux limites humaines, d’être un Messie non comme Dieu veut mais comme le peuple attend. Homme providentiel, qui donne du pain à tous, qui fait des prodiges, qui est adoré pour sa toute puissance. Jésus refuse d’entrer dans son jeu. Il décide d’être fidèle à la volonté de son Père, d’être le médiateur entre lui et l’humanité, d’être l’acteur de l’alliance promise et attendue. Jésus, Fils de Dieu, choisit la fidélité en s’appuyant sur la Parole de Dieu.
Les tentations ont peut-être changé de visages aujourd’hui mais les racines sont les mêmes. Celle de l’abondance, du toujours plus et à n’importe quel prix, est omni présente. Les bénéfices records de grands groupes industriels, les jeux qui vantent des gains de milliers d’euros, les banques qui nous font espérer de nouveaux bénéfices, etc. En sommes-nous plus heureux ? Ne vivons-nous pas dans l’illusion permanente d’un lendemain meilleur si nous vivions autrement ? L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.
Une autre tentation aujourd’hui est de faire croire que l’intelligence artificielle est la clé de la résolution de tous les problèmes. Grâce à elle un nouvel homme voit le jour et nos limites actuelles seront dépassées si non effacées. Alors nous rêvons de ce monde nouveau fait d’hommes parfaits, où la maladie grave n’existera plus, où la fin de vie ne se posera plus, où nous serons tous sur un petit nuage de bonheur sans fin. L’illusion de ce monde nouveau, nous rend-t-il heureux ? Sommes-nous convaincus que notre bonheur est une vie sans question et sans difficulté ? Sommes-nous sûrs qu’assistés par tous ses robots, nous vivrions mieux et plus heureux ? La vie de Jésus propose un autre chemin : celui de la responsabilité jusqu’au bout. Faire des choix, être libres, pouvoir choisir ses amis, ses amours, pouvoir s’émerveiller, être heureux, inquiets, souffrir, bref pouvoir vivre ici et maintenant, n’est-ce pas cela être homme et femme ? Jésus nous ouvre la voie pour résister à l’illusion, aux mirages et vivre notre vocation d’enfants de Dieu.
Enfin, la tentation de la gloire. Qui n’a pas rêvé un jour d’être le premier, de gagner la coupe, d’être félicité par tous ? Humain, trop humain ! Nous avons tous besoin de reconnaissance, d’être apprécié pour ce que nous sommes et ce que nous faisons. Nous avons besoin parfois d’un coup de pouce pour développer nos talents, mais de là à jouer la comédie du mensonge et à écraser les autres il y a une marge. Vouloir la gloire est le jeu des dictateurs et nous voyons où cela mène le monde. Vouloir la gloire à n’importe quel prix conduit à la mort et au malheur. Devant cette prétention, Jésus élimine le séducteur car il n’est pas venu pour se faire admirer mais pour servir.
Que ce temps de carême avec le Christ nous permette à chacun et ensemble de vivre le temps présent avec comme guide la Parole de Dieu, sûrs que Dieu nous aime, qu’il chemine avec nous et qu’il nous invite à la simplicité, au partage, à la prière et à la fraternité. Demandons-lui aussi de ne pas entrer en tentation et de nous délivrer de ce qui nous divise. Grâce à nous notre Eglise marchera sur ce chemin de foi, d’espérance et d’amour qui nous mène vers Pâques.
Père Jean COURTES