Passer du dû au don !  25° dimanche A    24 septembre 2023

Jean-François MILLET

A la première lecture, la parabole des ouvriers de la dernière heure est choquante, voire pour certains scandaleuse. Aujourd’hui le patron qui utiliserait la même méthode aurait tous les syndicats sur le dos. Ce qui nous choque, c’est l’égalitarisme : tous reçoivent un denier, le prix convenu certes, mais indépendamment de la pénibilité et du temps passé. Or le maître vigneron plaide non coupable en rappelant l’accord salarial et sa liberté de faire ce qu’il veut de ses biens. Il rajoute même une question perfide : « Ton regard est-il mauvais parce que moi je suis bon ? »

Cet évangile nous met devant deux conceptions de la justice, celle liée aux mérites, au travail effectué, etc. et celle égalitaire où tout le monde est au même niveau et reçois la même chose. Nos sociétés occidentales vivent et promeuvent la première, appelée justice distributive et nous avons du mal avec la seconde qui nivèle les situations et pratique l’égalité salariale. Manifestement Jésus affirme à ses interlocuteurs que Dieu pratique cette seconde justice et il y a de quoi être choqué.

Comment nous chrétiens de la première heure, croyants, pratiquants, essayant de vivre l’évangile au jour le jour, nous efforçant de pratiquer la charité dans des œuvres caritatives, ne manquant aucune messe, etc., pouvons-nous être traités comme les derniers venus, les nouveaux baptisés par exemple ? Jésus répond clairement dans cette parabole que Dieu nous accueillera dans le Royaume de cieux, que nous serons sauvés, mais que nous ne serons pas les seuls, nous côtoierons aussi les appelés de la dernière heure, des hommes et des femmes au passé moins vertueux, au cheminement de foi plus sinueux. Notre Dieu est amour et il appelle dans son Royaume toute personne qui accepte de travailler à sa vigne. En effet, peut-être que la pointe de la parabole n’est pas sur le salaire, mais sur l’embauche. Le maître du domaine n’arrête pas de sortir pour embaucher, pour que tous ceux qui le veulent puissent travailler dans sa vigne. Aux derniers il ne leur promet pas de salaire, mais ils seront traités de la même façon. Certains ont-ils refusés d’aller travailler à la vigne, l’histoire ne le dit pas. 

Chrétiens, Dieu nous appelle à travailler à sa vigne. Il nous envoie dans le monde pour annoncer sa présence, dire son amour pour tous les hommes et en témoigner par notre vie de fraternité. Un bel exemple ce week-end avec la venue du pape François à Marseille aux rencontres de la Méditerranée. Il témoigne devant le monde entier que tout homme a du prix aux yeux de Dieu, quelle que soit sa race, son pays, sa religion. Il rappelle que tous les migrants sont des enfants de Dieu et que nous devons les accueillir comme tels en particulier quand ils sont en situation de détresse. A notre tour, personnellement et collectivement de nous situer sur ce terrain du don gratuit de l’amour et de la fraternité. Certains d’entre nous sont engagés dans des associations caritatives, le Secours Catholique, restos du cœur, etc., d’autres essaient de vivre cette gratuité de l’amour dans des relations fraternelles. Dans son homélie au stade vélodrome de Marseille, le pape nous invite à retrouver le gout de l’engagement pour la fraternité. Avec elle et par elle, nous   dirons et redirons que l’amour est au cœur de la vie. Dieu nous appelle à rejoindre tous ceux qui essaient de changer le monde pour le rendre plus juste et plus humain. Notre Eglise porteuse de ce message d’amour et de gratuité peut faire avancer notre humanité sur le chemin de la paix et de la joie fraternelle. L’Esprit saint nous est donné pour cela.

Père Jean COURTES

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