Pour se réconcilier !  23° dimanche A.  10 septembre 2023

Coypel (1740)

L’évangile de Matthieu s’adresse à la première communauté chrétienne qui se trouve confrontée à des divisions, des disputes internes alors que le commandement de l’amour mutuel et fraternel est son mot d’ordre. Il résume l’enseignement de Jésus dans cette règle en trois temps quand un frère a péché contre toi : d’abord aller le rencontre seul pour s’expliquer ; si cela ne marche pas, ne change rien, faire appel à un tiers ; et si cela ne marche pas, faire appel à la communauté chrétienne. Il s’agit bien sûr non pas de juger le coupable, mais de sauvegarder le lien fraternel et de pouvoir vivre l’évangile concrètement entre chrétiens d’abord et avec tous aussi. Ce comportement est aussi un témoignage.

Aujourd’hui, la question de la résolution des conflits interpersonnels est à l’ordre du jour de tous. Que faisons-nous quand quelqu’un nous fait du tort ? Que faisons-nous quand nous sommes blessés, humiliés, déshonorés ? Que faisons-nous quand les coups viennent d’un proche et d’un membre de notre famille ? La première partie de la règle parait bonne et évangélique : « Si tu souviens que ton frère a un grief contre toi, laisse-là ton offrande et va te réconcilier avec lui » dit Jésus. Oser la rencontre pour mettre des mots sur le mal dont nous souffrons est souvent libérateur et ouvre un chemin de sortie. Reconnaissons-le, il est très souvent difficile pour de nombreuses raisons.

Alors la règle n° 2 doit être tentée : choisir un tiers pour instaurer un dialogue où chacun pourra s’exprimer et écouter l’autre. Médiateur, modérateur, il permet la prise de distance par rapport aux faits et de diminuer l’affectivité pour faciliter l’expression apaisée pour que chacun soit respecté dans ce qu’il vit. Nous le savons tous par expérience, la présence d’un tiers permet souvent d’avancer vers une sortie de crise et un rétablissement des relations humaines.  Mais hélas, cela ne marche pas à tous les coups. 

Alors, Matthieu nous engage à porter l’affaire devant la communauté chrétienne. Est-ce aujourd’hui possible ? Prenons un exemple : en famille, quand deux personnes s’affrontent et s’enferment dans leur vérité, quand un tiers n’a pas réussi à faire bouger les choses, convoquer un conseil de famille donne le pire des résultats, car il va rajouter du mal au mal. Même si les personnes appartiennent à la même communauté chrétienne, porter le conflit devant tous risque d’avoir le même effet. En effet nos communautés sont trop vastes, pas assez fraternelles et pas prêtes pour que cela puisse se vivre en vérité et bonheur. Car, il ne s’agit pas bien sûr, de juger de prendre parti, mais de permettre à chacun de revenir au lien fraternel, à l’amour mutuel dans ce moment difficile.

Pour nous le message évangélique est clair : quand nous sommes blessés ou que nous avons blessé quelqu’un, comportons-nous en chrétien : osons la rencontre pour faire la vérité ; si ce n’est pas possible appelons un tiers à la rescousse et si cela ne donne rien, faisons appel à quelques personnes que nous connaissons dans notre communauté chrétienne pour qu’elles nous soutiennent, qu’elles prient pour nous et notre agresseur et nous aident à garder le cap de l’amour fraternel. Ce rôle est peut-être à réinventer aujourd’hui dans l’Église.

Père Jean COURTES

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