Troisième catéchèse : le sacrement du pardon-réconciliation    23 mars 2025

En cette année jubilaire et de réouverture de la cathédrale Notre Dame de Paris, le diocèse nous propose de redécouvrir les sacrements. Aujourd’hui, nous réfléchissons, témoignons et soulignons l’importance du pardon, de la réconciliation et de ce sacrement dans notre vie chrétienne. 

Le sacrement du pardon-réconciliation existe depuis le début de l’Église. Sa forme a beaucoup changé au cours des siècles et sa pratique a varié en fonction des pays, des mentalités, des pastorales. Au début de l’Église c’est le baptême qui en tient lieu : la conversion, la Profession de Foi, le signe de l’eau expriment le désir de renaissance et de communion avec la vie du Christ ressuscité. Très vite c’est posé la question de ceux qui reniaient leur foi sous la contrainte des persécutions. Fallait-il les exclure définitivement de la communauté chrétienne ? Que dit l’évangile ? Après d’âpres discussions, l’Église décide d’accueillir les pécheurs qui reconnaissent leur trahison et qui veulent revenir au sein de la communauté chrétienne. Après un aveu public, une pénitence exécutée, ils sont absouts et réintégrés dans leur communauté. A partir du 6° siècle, ce sacrement va se recevoir en privé et le pénitent accomplira sa peine à l’insu de la communauté. Seul le confesseur sera témoin de sa conversion et lui donnera l’absolution. Jusque-là, le sacrement concernait les « grands pécheurs », et c’est au concile de Latran (1215) que chaque fidèle est invité à se confesser au moins une fois l’an à Pâques. La confession devient un acte de dévotion. Au concile Vatican II (1965) l’Église met l’accent sur la dimension ecclésiale et le rôle de la communauté, d’où le développement des célébrations communautaires, des journées du pardon, des invitations à vivre ce sacrement dans les grands rassemblements.

Rappelons-nous que dans l’Ancien Testament, le péché et la demande de pardon sont très présents ; David, qui a fait tuer son général en chef pour lui prendre sa femme, avoue sa faute et Dieu lui pardonne. Relisons le psaume 50 qui lui est attribué. Sur les bords du Jourdain, Jean-Baptiste accueille tous ceux qui reconnaissent que leur vie n’est pas en harmonie avec la Loi et il leur donne un baptême de conversion qui les ouvre à une vie nouvelle. Jésus recevra ce baptême. Dans le Nouveau Testament, Jésus parle souvent du péché et du pardon. Il déclare plusieurs fois qu’il est venu pour appeler les pécheurs (Mt 9, 13). Il raconte l’histoire d’un père qui a deux fils et qui pardonne à celui qui est parti loin de lui. Il « sauve » la femme qui a té surprise en adultère et que certains responsables religieux veulent lapider (Jn 8). Il guérit le paralytique en lui disant « tes péchés sont pardonnés » (Mc 2). Bref, Jésus exprime la miséricorde de Dieu pour tous ceux qui se sont éloignés de lui et qui reviennent vers Lui. N’oublions pas non plus la demande du Notre Père : « pardonnes-nous nos offenses, comme nous pardonnons ». Le pardon est au cœur de la prédication de Jésus, car il est lié à l’amour de Dieu pour nous. Paul lui aussi va prêcher le pardon dans ses communautés. Aux Corinthiens il demande de se laisser « réconcilier avec Dieu » et d’être les « ambassadeurs de la réconciliation »

Mais qu’est-ce que le péché ? C’est tout acte conscient que nous faisons contre l’amour de Dieu et des hommes. Le péché est l’acte qui brise une relation essentielle, vitale pour nous. Le péché fait du mal, il rend malheureux, il érige un mur entre nous, il enferme ou enfonce dans la solitude et le silence. Allons plus loin : chacun d’entre nous peut faire du mal à quelqu’un et les raisons sont multiples et variées. Souvent nous nions ce mal que nous faisons, mais, nous chrétiens avec l’évangile comme référence, nous savons quand nous n’avons pas aimé Dieu comme nous-mêmes, quand nous n’avons pas aimés nos frères et sœurs. Nous savons quand nous avons péché !

Une seule voie de sortie : le pardon. Qu’est-ce que pardonner ? C’est choisir librement et volontairement le bien au lieu du mal, c’est arrêter cette histoire qui nous fait souffrir, c’est dire stop au mal car nous avons envie d’être heureux. Nous avons envie de vivre autrement, nous avons besoin de retrouver la paix et la joie de vivre. Dans la parabole du Fils prodigue, c’est l’attitude du cadet qui arrête sa vie de galère pour retrouver la chaleur de la maison paternelle. Pardonner est un acte personnel où nous choisissons la vie plutôt que de rester dans le ressentiment et le malheur. Pardonner c’est aimer, c’est mettre notre relation avec Dieu et les autres au-dessus de tout. Pardonner est difficile, parfois même très difficile à tel point que nous avons besoin d’aide pour le faire. Pardonner, ce n’est pas oublier, bien au contraire c’est affronter en vérité la réalité. Pardonner c’est vouloir vivre libre.

Peut-on pécher par omission ? Bien sûr, car parfois nous oublions la logique de l’amour, de l’amitié, tellement nous sommes centrés sur nous. Au lieu de manifester notre amour et notre fraternité, nous posons des gestes ou disons des paroles qui nous distancient. S’arrêter pour le reconnaitre, c’est vouloir renouer, remettre au centre de notre vie les relations qui nous font vivre.

Le sacrement du pardon-réconciliation est l’aide que l’Eglise nous propose quand nous avons commis du mal et que nous en sommes victimes. Rappelons-nous que tout sacrement est un geste concret de rencontre et de communion entre le baptisé et le Christ ressuscité. En relisant notre vie à la lumière de l’évangile, nous reconnaissons que notre relation à Dieu et à nos frères a pris des coups, est cabossée par endroits. Le sacrement est là pour retisser ces liens d’amour et de fraternité. Il nous manifeste l’amour infini de Dieu pour nous quelles que soient nos fautes et nos péchés. Il nous ancre de nouveau dans cet amour du Christ qui a donné sa vie pour nous. Il nous ouvre à une vie nouvelle qui est la réconciliation. Pour qu’elle ait lieu, il faut que les deux parties soient d’accord. Par le sacrement, par notre foi en ce Dieu amour qui a pris corps en Jésus, nous savons qu’il est toujours d’accord et en attente d’un geste de notre part. Reste à faire le pas vers la personne que nous avons blessé ou qui nous a blessé. Difficile réconciliation qui prend souvent du temps, de la patience, de la volonté et qui nous fait croire en l’autre et en sa capacité de changement, qui nous fait croire en nous et en Dieu, qui nous donne son Esprit saint pour vivre dans « l’amour, la patience, la bonté, la bienveillance, la douceur, la maîtrise de soi… » (Galates 5, 22)

Laissons-nous réconcilier avec Dieu et avec les autres pour la joie de Dieu et la nôtre. 

Père Jean COURTES

Les commentaires sont fermés.