Jacques et Jean veulent être bien placés au paradis, qui pourrait leur en vouloir ? Les apôtres sont outrés de leur sans gêne. Jésus calme le jeu. Jacques et Jean, vous, moi, tout croyant qui croit en Dieu et en une vie de communion avec lui, après la mort, n’a-t-il pas ce désir d’être accueilli dans ce que nous appelons le paradis ?
Jésus demande à Jacques et Jean s’ils sont prêts au baptême du feu, se sentent-ils capables de le suivre dans cette vie d’opposition aux responsables religieux ? Veulent-ils continuer à l’accompagner dans la précarité sur les chemins de Palestine ? Sont-ils capables de le suivre jusqu’à la croix ? Apparemment oui, même s’ils n’en connaissent pas les difficultés. Jésus reconnait leur courage, tout en les décevant : ce qu’il demande n’est pas de son ressort. De toute façon avec lui il n’est pas question d’être bien placé, d’avoir du pouvoir, mais de prendre comme lui le chemin du serviteur.
L’évangile nous propose souvent cette conversion : nous voulons être puissants, premiers, forts, etc., il nous demande de renverser la logique : être fragiles, humbles, au service des autres. Pourquoi ? Tout simplement parce que l’amour se vit dans le don de soi, dans l’ouverture à l’autre, dans le dialogue et non la compétition. « Quand tu es invité à des noces, dit Jésus, ne va pas te mettre à la première place de peur que l’on ait invité quelqu’un de plus important que toi et que celui qui vous a invités ne vienne te dire : cède-lui la place » (Luc 14, 9). Le soir du Jeudi saint, Jésus prit un linge qu’il se noua à la ceinture et il lava les pieds de ses apôtres. Être serviteur, devenir serviteur de ceux qui nous entourent, voilà le chemin qui mène au paradis.
Ce chemin de communion, d’amour et de fraternité est difficile, plein d’embûches, de pièges, mais aussi de joies partagées. Nous connaissons bien le piège du pouvoir, de la puissance qui s’immisce partout avec les meilleures intentions du monde. Nous le constatons souvent dans nos associations, nos relations familiales et amicales. Et pourtant c’est au cœur de ces relations voulues et partagées que nous vivons de grandes joies et que nous grandissons en humanité. Jésus nous invite à cette communion avec lui et avec les autres dans le don et la gratuité.
Notre Eglise est en synode pour chercher justement à être davantage au service d’une humanité souffrante. Son histoire révèle à certaines périodes son goût du pouvoir. Depuis plus d’un siècle, elle cherche à être servante et pauvre. Ce n’est pas facile ! En revenant à sa source, l’évangile et la vie du Christ, elle essaie de rejoindre notre humanité pour partager avec elle la compassion du Christ. Notre Dieu est celui qui aime, fait alliance, pardonne, restaure chaque homme, chaque femme dans sa dignité d’être humain, né pour aimer et être aimé. Notre Eglise annonce le paradis non comme un bien à obtenir par des prières ou des pratiques à faire, mais comme le cadeau de Dieu à tous ceux qui aiment et cherchent la communion. La vie éternelle que nous partageons dès aujourd’hui est cette relation d’ouverture, de don, de communion mutuelle.
Père Jean COURTES