05/02/2023
Lectures : Is 58, 7-10 | Ps 111 (112) | 1Co 2, 1-5 | Mt 5, 13-16
Nous sommes depuis dimanche dernier entré dans une lecture continue sur 4 dimanches du chapitre 5 de l’évangile de Matthieu, qui inaugure le sermon sur la montagne, discours adressé par Jésus aux disciples et à une large foule et qui porte sur l’éthique c’est-à-dire les jugements moraux. Nous avons commencé dimanche dernier avec les Béatitudes. Ces textes sont l’occasion dimanche après dimanche de nous mettre à l’écoute de ce long enseignement.
Qu’en est-il pour ce dimanche ?
Si nous prenons chacun des textes isolément nous voyons que dans le texte d’Isaïe, Dieu s’adresse directement à nous pour nous indiquer fermement quelle doit être notre mission. Il nous intime l’ordre de nous rendre proche du pauvre, « celui qui a faim », « les pauvres sans abri », le « sans vêtement ». Si nous remplissons cette mission alors notre « lumière jaillira » et quand nous appellerons le Seigneur « il répondra ». Cette analogie à la lumière peut paraître encore un peu sibylline, mais elle prendra tout son sens avec Paul et Matthieu. Une chose est claire en revanche, en nous tournant vers le pauvre, en mettant de l’ordre dans notre vie (en y faisant disparaître « le joug », nos dépendances) et en nous mettant à la place de l’autre, alors le dialogue avec le Seigneur est possible.
Dans l’épitre aux Corinthiens, Paul réaffirme ce pourquoi il est venu, la mission qu’il a reçue : « annoncer le mystère du Christ crucifié », et pas n’importe comment, avec humilité « dans la faiblesse, craintif et tout tremblant ». Paul s’est mis à la place du pauvre comme le prescrivait le Seigneur au travers d’Isaïe. Il nous parle du comment annoncer la parole de l’Évangile. Il ne s’agit pas de « convaincre », faire entrer fortement une opinion dans l’esprit de quelqu’un. Dans convaincre sonne d’ailleurs « vaincre », remporter une victoire sur un rival. Il s’agit dans l’humilité de laisser « l’Esprit [saint] et sa puissance se manifester ». Comme dans Isaïe, alors « la gloire du Seigneur fermera la marche ».
Et enfin dans l’évangile, Jésus après avoir précédemment dévoilé le projet de Dieu avec les Béatitudes, s’adresse à ses disciples en leur rappelant leur vocation au travers des images familières que sont le sel au rôle d’exhausteur de goût et la lumière qui rehausse les couleurs. Nous avons tous en tête la fadeur d’un plat de pâtes dont nous avons oublié le sel lors de la cuisson. L’analogie du sel nous fait mieux comprendre celle de la lumière. Il ne nous est pas demandé ici de faire ou de ne pas faire quelque chose, ni conseillé sur comment le faire ; il nous est uniquement demandé d’être nous-même et expliqué qu’en tant que disciple de Jésus, nous sommes « le sel de la terre », « la lumière du monde ». Cette identité, présupposant sans doute qu’en tant que disciple nous avons fait nôtres les prescriptions d’Isaïe et de Paul, fait de nous des révélateurs de la présence de Dieu. L’Esprit saint rayonne au travers de nous et donne de la saveur à la vie. Notre vocation est de sortir de chez soi, de nous mettre en route et de briller.
Il est à noter que dans une certaine mesure ces 3 textes auraient pu n’en faire qu’un, car ils s’enchainent, s’articulent remarquablement. Ceci provient de ce qu’ils soulignent une sorte de chronologie : ce que doit faire le peuple de Dieu avec Isaïe, comment s’y prendre en adoptant une attitude d’humilité avec Paul et l’identité donnée par Jésus à ceux qui lui emboitent le pas : « sel de la terre » et « lumière du monde ».
Ces 3 textes d’autre part, se répondent, voire unissent leur voix pour nous parler du projet que Dieu souhaite déployer à travers son peuple, à travers les disciples de Jésus, à travers nous in fine. Un monde où la relation entre les hommes est centrale, construite sur la base d’une attention vers celui qui est dans le besoin, en empruntant une attitude d’humilité pour que s’exprime alors la puissance de l’Esprit. Dieu passe par nous et s’adresse ainsi au plus grand nombre.
Dans notre actualité nous avons retrouvé dans le pape François, tant dans sa personne qu’au niveau de ce qu’il prône texte après texte, une grande similitude avec les textes de ce jour. En voici quelques éléments emblématiques. Tout d’abord il a fait le choix du nom de François, en référence à François d’Assise, le saint des pauvres. D’autre part dès l’homélie de sa messe inaugurale, le pape invite « à avoir du respect pour tous, pour chaque personne, spécialement les enfants, les personnes âgées, ceux qui sont les plus fragiles et qui souvent se trouvent à la périphérie de notre cœur ». Dans le même ordre d’idée, dans un contexte d’immigration soutenue, il a lancé un appel à tous les chrétiens d’Europe, à accueillir une famille de réfugiés par paroisse. Et comme dernier exemple nous prendrons l’encyclique « Fratelli tutti » (tous frères) bien connue des paroissiens de la chapelle puisqu’ étudiée ensemble et que le pape lui-même commente en insistant sur la « capacité de fraternité » et l’« esprit de communion humaine » nécessaires à la construction d’« une société plus juste ».
Mourad BENNOUI, Catherine Thibaut et Jean-Paul PASQUET