C’est la Pâque, l’activité du Temple de Jérusalem est à son comble, il y a des milliers de personnes dans les différents parvis. Chacun vient accomplir les rites pour célébrer cette grande fête. Les marchands sont bien sûr là puisqu’il faut des animaux pour le sacrifice, des changeurs puisqu’il ne faut pas que la monnaie romaine entre dans le Temple car cela le souillerait. Même Marie et Joseph ont acheté un couple de tourterelles ou de pigeons quand ils sont venus présenter Jésus au Seigneur et le faire circoncire. Le Temple est le symbole très fort de la présence de Dieu au milieu du peuple.
Or, en cette fête de la Pâque, Jésus juge que le commerce a pris le dessus, que l’argent occupe plus les hommes que la prière et le respect de la Loi. Comme Isaïe, Amos et bien d’autres prophètes, il crie sa colère en bousculant quelques tables de marchands et en ordonnant l’arrêt de ce trafic. Que le Temple redevienne la maison de Dieu ! Bien sûr la police du Temple accourt et Jésus est mis en demeure de s’expliquer. Il va alors parler d’un autre Temple, de lui comme nouveau Temple de Dieu parmi les hommes. Ils ne pouvaient pas comprendre. Sous le choc du scandale, il leur était impossible de croire qu’il était l’envoyé de Dieu, lui qui bousculait le lieu de Dieu. Les disciples même vont mettre du temps pour comprendre que Jésus parlait de lui puisque ce n’est qu’après la résurrection qu’ils vont donner du sens à cette parole.
Pour nous aujourd’hui cette page de saint Jean questionne notre foi. Croyons-nous sue Jésus est à la fois homme et Dieu ? Croyons-nous qu’il est le Temple de Dieu, la présence pleine et définitive de Dieu pour notre monde ? Croyons-nous que nous sommes à notre tour, grâce à lui, habités par Dieu ? Pour nous chrétiens, croire en Jésus ressuscité, c’est croire non seulement qu’il est vivant éternellement mais que par lui, puisqu’il est en nous, nous sommes à notre tour présence de Dieu dans notre monde. Notre foi chrétienne en la résurrection de Jésus fait de chacun des croyants une présence de lui auprès des autres hommes. Comme les juifs dans le Temple nous nous posons des questions : sur quoi nous baser pour le croire ? A quoi ressemblera notre propre résurrection ? Nous n’avons aucune certitude sauf celle de l’amour infini de Dieu pour l’humanité. Dans le Temple, nous dit saint Jean, beaucoup crurent en son nom, parce que les paroles de Jésus et ses actes étaient en accord avec le cœur de l’Alliance, avec le cœur de Dieu. Nous qui croyons au Christ, nous expérimentons de temps en temps la présence de Dieu en nous et au cœur de la vie de certains de nos propres ; il y a des signes qui ne trompent pas, des certitudes qui s’imposent, des révélations qui apparaissent. Nous sommes présence de Dieu dans ce monde difficile, violent et nous avons reçu l’Esprit saint pour tisser ces gestes d’amour, de fraternité et de solidarité qui seuls peuvent sauver notre humanité. Alors, il faut bousculer en nous et autour de nous quelques habitudes, certitudes, etc. pour oser la parole et le geste libérateurs. Le carême peut nous y aider.
Père Jean COURTES